Le four banal est un élément important du patrimoine de la commune. Avec le château c’est un des plus anciens bâtiments de Varaignes. Il se situe à l’une des entrées du bourg, juste après le guet qui permettait de franchir le ruisseau. Des sources historiques rapportées par Jean-Louis Delage nous informent qu’un péage se trouvait également à cet endroit.
Le four banal, comme à l’époque les moulins banaux et autres équipements importants appartenaient au seigneur de Varaignes. Les habitants avaient l’obligation de venir y faire cuire leur pain et bien sur de payer une redevance d’usage au seigneur.
Cette gravure est la plus ancienne représentation que nous ayons de notre précieux four. On peut y voir un ancien varaignaud qui vient puiser de l’eau à la fontaine Saint-Jean que l’on aperçoit au premier plan. Le four est remarquable avec son toit périgordin typique. Il est aussi possible d’apercevoir à l’arrière plan à gauche le Puy-de-Belet.
Cette photo est plus récente, Elle date des années 30 et représente le four banal en très bon état et tel que l’association ambitionne de le restaurer. Comme vous pouvez le voir en comparant cette photo à celles qui sont publiées dans l’onglet travaux, il reste du travail à accomplir pour les bénévoles de l’association.
Seigneurs et Droits seigneuriaux dans la France d’Ancien Régime
Par Simon Rousselot, étudiant en Histoire à l’Université de Poitiers
Avant de rentrer dans le vif du sujet, soit la description des banalités, il convient d’aborder les notions de seigneur et de droits seigneuriaux nécessaires à la compréhension de certaines relations de domination dans le monde rural sous l’Ancien Régime (celles seigneurs/ruraux).
Premièrement, pas de banalités sans seigneur. Enfonçons une porte ouverte en disant qu’il est le détenteur d’une seigneurie. Celle-ci est une zone géographique qui lui permet de disposer de droits sur la terre et sur les personnes qui y vivent. Au XVIIe siècle, on en compte dans le royaume entre 60 et 80 000. A cette époque-là, une personne peut posséder plusieurs seigneuries qui s’achètent et se vendent comme n’importe quel autre bien à ceci près qu’elles sont considérées comme des éléments d’honorabilité. Le seigneur habite rarement dans sa seigneurie (surtout s’il en possède plusieurs) et délègue ses droits à des officiers.
Le seigneur est propriétaire d’un ensemble foncier, la réserve seigneuriale, qu’il exploite directement ou non (mais cette réserve n’est qu’une partie de la seigneurie). Tordons le cou à une représentation mentale générale, si les seigneurs étaient majoritairement des nobles, certains étaient des ecclésiastiques ou, plus rarement, de simples bourgeois. Dans certaines seigneuries, le seigneur était le roi ! Toujours est-il que par nature, le seigneur est le « premier partout » selon l’expression de Pierre Goubert : premier à l’église avec son banc à part et souvent son entrée particulière, premier du village où il est le plus gros propriétaire, où lui seul peut posséder un colombier ou chasser…
Deuxièmement, le seigneur, outre la possession de son domaine foncier, possède un complexe de droits sur les hommes et la terre qui exprime la propriété éminente et la justice qu’il détient, ce sont les fameux droits seigneuriaux. Nombreux, on peut néanmoins en citer quelques uns ici, parmi les plus importants :
- L’aveu et dénombrement qui permet au seigneur, en reconnaissant tenir son fief d’un suzerain, de posséder la haute, moyenne ou basse justice. Par l’exercice de la justice, le seigneur commande d’une certaine façon la vie quotidienne des ruraux (garantie de paiement des redevances). A la fin de l’Ancien Régime, rares sont les seigneurs qui rendent la justice eux-mêmes.
- Les droits de terrage ou de champarts qui sont des redevances en argent ou en nature pour la location des terres du seigneur à des fins d’exploitation agricole. Ils pouvaient varier entrer 5 et 10% de la récolte annuelle d’un paysan.
- La corvée seigneuriale qui est un nombre de jours par an où les membres de la communauté des habitants travaillent gratuitement pour le seigneur (fauchage de son pré, vendange de ses vignes…). En échange, il est d’usage que celui-ci nourrisse les corvéables.
Venons-en enfin au droit seigneurial qui nous intéresse le plus, les banalités. Le nom vient du ban qui est au haut Moyen-Age (Ve-XIe siècles) le pouvoir royal d’ordonner, de contraindre et de punir. Ce pouvoir de ban était délégué aux agents locaux du roi. Avec le temps, cette délégation du ban royal s’est transformée en prérogative seigneuriale. C’est de là que viennent les banalités.
Sous l’Ancien Régime, le seigneur déclarait ou faisait déclarer « le ban » soit le début de la moisson et de la vendange (qu’il effectuait en premier bien sûr). Très souvent, et c’est là que ça nous intéresse le plus, il possédait aussi le pressoir (très rémunérateur dans les régions viticoles), le four ou le moulin. S’ils sont désignés comme « banaux » c’est parce que les paysans étaient contraints, contre rémunération, d’y aller. Dans certaines provinces pourtant, ces endroits appartenaient à la communauté des habitants, ils étaient alors dit « communaux » mais restent très minoritaires.
Au terme de cette petite présentation, il faut rappeler à toutes fins utiles que les droits seigneuriaux n’ont pas été en vigueur qu’au seul Moyen-Age mais qu’ils se poursuivirent sous l’Ancien Régime (leur abolition a eu lieu en deux temps, d’abord lors de la Nuit du 4 août 1789 puis définitivement en 1793).
Les zones d’affrontements entre seigneurs et paysans ont été nombreuses tout au long de la période notamment sur les questions de chasse et de pêche (prés carrés du seigneur) et sur l’utilisation des communaux (rivières, forêts, certains pâturages que la communauté pouvait utiliser librement). Ces relations difficiles entre seigneurs et paysans, outre des révoltes éphémères ici ou là, seront exprimées très nettement dans les cahiers de doléances à la veille de la Révolution.
Pour aller plus loin sur la vie rurale en France :
- DUBY Georges, Seigneurs et paysans : Hommes et structures au Moyen-Age, Champs Flammarion
- DUBY Georges, WALLON Armand (dir.), Histoire de la France rurale, 4 tomes, Points Histoire
- GOUBERT Pierre, La vie quotidienne des paysans français au XVIIe siècle, Hachette
- GOUBERT Pierre, L’ancien régime, tome 1 : La société, tome 2 : Les pouvoirs, Armand Colin